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Les premiers mots que j’ai écrits pour ce présent article furent : « Petit historique du chantier Scott ». Puis je me suis ravisé, une question m’étant venue à l’esprit : que sais-je de la naissance de la Compagnie Générale Transatlantique qui le porta au berceau ? Des brides d’informations assurément. J’ai contemplé la pléthore de livres et documents dans ma bibliothèque traitant de ce sujet… feuilleté quelques-uns… Hum… Le constat est sans appel : il serait bon de réviser, repréciser dans mon esprit la chronologie de l’établissement des lignes transatlantiques et par là même en dégager les péripéties de sa naissance… C’est l’objet de cet article.
La naissance des services transatlantiques en France
Le développement anglosaxon
La navigation au moyen de la vapeur fut appliquée et développée en premier lieu à la navigation fluviale et côtière. En 1807, Fulton établit un service régulier sur l’Hudson entre New York et Albany distants de 222 km. En 1819, le Savannah, un bâtiment américain traversa l’Atlantique à l’aide de ses voiles et de la vapeur.
Les chemins de fer se développèrent et les progrès techniques réalisés rendaient possibles un développement similaire sur les océans au moyen de vapeurs rapides. Les grandes nations maritimes en firent une de leurs principales préoccupations.
En 1837, le Syrius et le Great-Western, partant l’un de Cork, l’autre de Dublin arrivèrent à New York. On vit alors de grandes compagnies se former pour la navigation à vapeur transatlantique, encouragées par de fortes subventions.
Une décennie plus tard, leurs paquebots parcouraient toutes les mers. Des services réguliers rattachaient l’Amérique, l’Inde, la Chine, l’Australie à l’Angleterre. Les États-Unis suivirent l’Angleterre dans la même voie. Ils établirent, eux aussi, des services réguliers à vapeur sur l’Europe, les Antilles, le Pacifique et entre les ports les plus importants de leurs immenses côtes.
Que faisait la France pendant qu’elle se faisait distancer ? Elle discutait, discutait et rediscutait la question transatlantique sans pouvoir mettre en place un projet viable…
Les tentatives françaises
Projet de 1840

Dessin Michel-Claude Mahé
La première tentative française pour mettre en place une navigation rapide entre la France et les Amériques, en utilisant la force de la vapeur, date de 1840. Un projet de loi * était alors présenté aux Chambres.
Trois lignes principales devaient être établies :
1) Le Havre à New York ;
2) Une ligne partant alternativement de Bordeaux et de Marseille vers les Antilles, avec un embranchement d’une part sur le golfe du Mexique et la Nouvelle- Orléans, et d’autre part vers Carthagène et Chagres ;
3) Une ligne partant de Saint-Nazaire sur Rio Janeiro, avec un service annexe touchant Montevideo et Buenos-Aires.
Le ministre de la Marine se vit mettre à sa disposition vingt-huit millions de francs pour construire 18 bâtiments ** de 450 à 220 chevaux et celui des Finances l’autorisation de traiter avec une compagnie qui assurerait le service du Havre à New York moyennant une subvention de 800 francs par cheval.
La ligne du Havre à New York ne trouva aucun candidat, la subvention ayant paru trop faible. Cinq années d’études s’écoulèrent avant que l’on prît conscience que les constructions n’étaient pas adaptées au service demandé et que le projet était voué à l’échec.
*) Dans Loi du 16 juillet 1840, il était établi un principe d’égale répartition de l’appui du gouvernement aux quatre grands ports de mer et de conserver à chacun le commerce spécifique auquel il était en possession. Ainsi le Havre devait avoir la ligne des États-Unis ; Nantes, celle du Brésil ; Bordeaux et Marseille, les deux lignes des Antilles et du Mexique, dans la proportion de trois cinquièmes pour Bordeaux et de deux cinquièmes pour Marseille.
** En juin 1845, on constatait que 17 avaient été construits dans les arsenaux et étaient à la disposition du gouvernement (450 chevaux : Albatros, Canada, Caraïbe, Christophe-Colomb, Darien, Labrador, Montezuma, Orénoque, Panama, Ulloa ; 220 chevaux : Caïman, Élan, Espadon, Phoque).
Projet de 1845

Dessin Michel-Claude Mahé
En 1845, le gouvernement saisissait les Chambres d’un nouveau projet de loi dans lequel il demandait à traiter avec des compagnies pour l’exploitation de quatre lignes principales, partant de France et aboutissant à Rio Janeiro, à la Martinique ou à la Guadeloupe, à la Havane et à New York et l’autorisation de passer des traités pour des lignes secondaires qui seraient desservies par des paquebots de moindre force sur Montevideo et Buenos Aires, sur la Guyane et sur les ports du golfe du Mexique et de la mer des Antilles.
Le projet de loi indique seulement les points d’arrivée des lignes. Il laisse aux compagnies qui sont appelées à les soumissionner le choix des points de départ de France *.
*) La chambre de commerce de Bordeaux a réagi à cette disposition qui n’était plus dans l’esprit de la loi de 1840 à savoir une répartition équitable sur les quatre ports et suivant leur spécificité commerciale. Elle demandait que les points de départ de France continuent à être répartis entre les quatre ports du Havre, de Nantes, de Bordeaux et de Marseille.
La commission chargée de l’examen des propositions de la loi proposa :
- de maintenir les points de départ fixés par la loi de 1840 et de laisser au gouvernement d’affecter ultérieurement les points d’arrivée pour chacun des ports ;
- d’adopter le principe de l’exploitation des lignes principales par les seules Compagnies ;
- de n’allouer de crédits pour aucune nouvelle construction de paquebots. Elle considérait que ceux déjà construits avec les autres bateaux à vapeur que possède le gouvernement suffisent pour le moment pour l’exploitation des lignes transatlantiques ;
- de ne les ouvrir qu’en 1846.
Le projet de loi est retiré et remis à la prochaine session de l’année suivante.
En 1847 – Compagnie Hérout et de Handel

Dessin Michel-Claude Mahé.
En 1847, deux nouveaux projets de loi furent présentés :
1) Le premier demandait l’approbation d’un traité passé entre le ministre des Finances et la compagnie Hérout et de Handel, pour le service du Havre à New York.
2) Le second, réclamait l’autorisation de passer, avec une ou plusieurs compagnies, des traités pour l’exploitation de trois lignes principales partant de Saint-Nazaire, de Bordeaux et de Marseille, et aboutissant à Rio Janeiro, à la Martinique ou à la Guadeloupe et à la Havane * avec des services annexes vers Buenos Aires, la Guyane, les ports de la mer des Antilles et du golfe du Mexique.
Le projet de loi relatif au traité avec la compagnie Hérout et de Handel fut adopté * et le service établi avec quatre paquebots du gouvernement **.
*) La durée du traité était de dix années consécutives à compter du jour de la remise des paquebots à la Compagnie. Il fut approuvé ainsi que le cahier des charges par la loi du 25 avril 1847.
La Compagnie s’engageait à établir la ligne de paquebots pour le transport régulier des dépêches, des voyageurs et des marchandises. Le gouvernement lui avait concédé, pour tout le temps que durerait le traité et pour lui tenir lieu de la subvention, quatre paquebots de la force de 450 chevaux à la condition que ces bâtiments resteraient la propriété de l’État et que le ministre des Finances pourrait, en cas d’inexécution de l’une ou de plusieurs des clauses de la convention, en ordonner la réintégration dans les arsenaux de la marine royale.
**) Darien, Uloa, Christophe Colomb, Canada, exploités sous les noms de : New-York, Missouri, Philadelphie et Union. Ces bateaux, issus des constructions réalisées par la loi de 1840, étaient complètement équipés en paquebots transatlantiques avec des aménagements particulièrement luxueux.
En 1848, elle a suspendu son service pour manque de rentabilité et cessé de remplir ses engagements. Par décret du 12 avril 1848, le gouvernement provisoire * a autorisé le ministre de la Marine à s’emparer des bâtiments concédés à la Compagnie.
*) Gouvernement qui a suivi la révolution de 1848.
Le second projet de loi, qui prescrivait l’établissement de trois autres lignes, après deux rapports, dont l’un ajoutait un prolongement jusqu’à la Nouvelle- Orléans, ne fut pas discuté.
En 1855 et 1856
En 1855 et 1856, le gouvernement français provoqua des soumissions pour l’exploitation des trois lignes de New York, des Antilles et du Brésil.
Sept compagnies répondirent à cet appel en mars 1856 *. Une commission formée par le ministre des Finances examina leurs propositions et en premier lieu élimina quatre d’entre elles. Trois seulement restèrent en liste **.
*) Les Compagnies principales en concurrence :
MM. Gauthier frères ;
Les Messageries impériales et la Compagnie maritime du Crédit mobilier fusionnées ;
La Compagnie franco-américaine de MM. Gauthier frères ;
La Compagnie Barbey, de la Moskowa, de Montebello ;
La Compagnie V. de Marziou, Rothschild, Dufour et autres ;
La Compagnie Fouché et Comp. ;
La Compagnie A. Séguin, des Ateliers de construction de Sète (Cette, selon la graphie de l’époque).
**) La Compagnie V. de Marziou, Rothschild, Dufour et autres ; subvention demandée : 10 millions ;
La Compagnie franco-américaine de MM. Gauthier frères ; subvention demandée : 11,5 millions ;
Les Messageries impériales et la Compagnie maritime du Crédit mobilier fusionnées ; subvention demandée : 16 millions.
La décision fut ajournée. Le gouvernement présenta un projet de loi qui fut voté le 7 juin 1857 qui autorisait le paiement d’une subvention maxima de 14 millions pour l’exploitation de trois lignes de correspondance à vapeur entre la France et :
1) New York ;
2) les Antilles, Aspinwall, le Mexique et Cayenne ;
3) le Brésil et Buenos-Aires.
En 1857 – Messageries impériales et 1858 Compagnie Marziou
La loi du 17 juin 1857, a autorisé le paiement par l’État d’une subvention annuelle de 14 millions pour l’exploitation de trois lignes de correspondances, au moyen de paquebots à vapeur, entre la France et :
- New York ;
- les Antilles, le Mexique, Aspinwall et Cayenne ;
- le Brésil et Buenos Aires.

Dessin Michel-Claude Mahé.

Dessin Michel-Claude Mahé.
Le décret du 19 septembre 1857 concéda aux Messageries impériales le service de Bordeaux et Marseille au Brésil, avec prolongement sur la Plata (Buenos Aires), moyennant une subvention annuelle de 4 700 000 francs *
*) La Compagnie des Messageries impériales devait exécuter deux voyages par mois, soit vingt-quatre voyages par an, avec un départ alternativement de Bordeaux et de Marseille. Tout juste avant l’expiration du délai de trois ans accordé par le cahier des charges, elle exécuta un premier voyage de Bordeaux à Rio Janeiro avec le vapeur à roues la Guienne, de 500 chevaux et de 1167 tonneaux. Il quitta le port de Bordeaux le 26 mai 1860 et fit escale à Lisbonne, Saint-Vincent (Îles du cap Vert), Pernambuc et Bahia.
Les départs suivants de Bordeaux étaient prévus le 25 de chaque mois et effectués par les paquebots à vapeur à roues de 500 chevaux : Navarre, Estramadure, Béarn.
Le service annexe entre Rio Janeiro, Montevideo et Buenos Aires fut inauguré le 24 octobre 1860 avec la Saintonge, paquebot à roues de 250 chevaux.
La suppression de la deuxième ligne du Brésil et de la Buenos Aires partant de Marseille fut consentie par l’État. Aux termes de la convention du 22 avril 1861 la subvention fut réduite à 2,306,172 francs mais la Compagnie devint concessionnaire du service postal de l’Indochine. Celui-ci était au départ de Suez et aboutissait à Saïgon avec des services annexes aboutissant à l’Inde anglaise, la Réunion, Maurice, Manille, Java, Canton et Shanghai. Une subvention moyenne de 6 millions pendant vingt-quatre ans a été attribuée à ce service en vertu de la loi de juin 1861.
Le 20 février 1858, un second décret mit la Compagnie Marziou ** en possession de la concession des deux services :
- du Havre à New York ;
- Saint-Nazaire aux Antilles et Aspinwall, avec des services annexes sur la Guadeloupe, le Mexique et Cayenne.
La subvention accordée fut fixée à 9 300 000 francs. Un cahier des charges annexé au décret de concession détermina les conditions d’exploitation des deux lignes.
Le 16 octobre 1860, le concessionnaire, faute d’investisseurs, proposa de se désister en faveur de la Compagnie générale maritime.
**) Elle se présentait sous le patronage de la compagnie du chemin de fer d’Orléans.
Mises à jour : 16-05-2023, ajouts des compagnies soumissionnaires au paragraphe « En 1855 et 1856 »