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Saint-Nazaire, naissance d’un port
Nous avons vu dans l’article précédent où se trouvaient les principaux chantiers dans l’estuaire en 1875, notre année de référence, et que cette dernière se situait dans une période où les grands chantiers de Saint-Nazaire avaient cessé leur activité.
Je ne me retrouvais pas dans la chronologie des événements de cette période, peut-être est-ce mon esprit plus scientifique que littéraire, aussi pas à pas, année par année, j’ai repris les informations des documents d’époque pour compléter mes fiches déjà établies dans des travaux précédents.
Il m’a semblé essentiel, pour mieux appréhender, bien situer l’enchaînement des grandes transitions et transformations qui se sont faites, de les organiser dans un rapide historique du développement de Saint-Nazaire sous la forme d’un synoptique.
Dans un second temps, à titre de simple curiosité, nous verrons qu’elles ont été leurs implications sur la démographie de cette ville naissante.
La fin du 19e siècle fut marquée par un net ralentissement de l’augmentation de la population… ce ne fut pas le cas pour Saint-Nazaire *. Simple bourgade, avant 1850, Saint-Nazaire est l’exemple unique en France d’une ville se développant avec la spontanéité qui caractérise les cités américaines. M. Henri Chevreau **, préfet, conseillé d’État, qui a beaucoup œuvré pour son développement, l’avait qualifié de « Liverpool de l’Ouest ».
*) Voir article : « Le ralentissement démographique en France à la fin du XIXe »
**) Un quai du bassin de Saint-Nazaire et une rue de Paris portent son nom.

*) Le premier bassin dit « bassin de Saint-Nazaire » – Les deux cales de radoub à droite n’ont jamais été construites.

Nous avons vu que l’embouchure de la Loire est sujette à l’ensablement et l’envasement. Ce phénomène naturel empêchait le passage des gros navires vers Nantes.
Pour remédier à ce problème, on procéda à des allègements, des transbordements dans les rades de Paimboeuf et de Mindin sur des allèges qui descendaient et remontaient la Basse-Loire.
Pour offrir un avant-port à Nantes et opérer ces transbordements dans des eaux plus tranquilles, l’établissement d’un bassin à flot, mis en service en 1857, le plus de grand de France à l’époque, était le moyen le plus adéquat.
La compagnie de chemins de fer de son côté, pour l’intérêt de son trafic et optimiser ses transbordements, a vu d’un bon œil la possibilité de traiter des navires de tout tonnage et en accostant au plus près de ses rails. Elle étendit son réseau jusqu’à Saint-Nazaire en août 1857.
En 1862, la Compagnie Générale Transatlantique établit ses deux têtes de lignes postales vers l’Amérique centrale.
Saint-Nazaire ne cessera alors de prendre de l’importance et devint chef-lieu d’arrondissement, c’est-à-dire sous-préfecture, à la place de Savenay en 1868.
L’extension du commerce maritime nazairien fut croissante au détriment de Paimboeuf et sur fond de rivalité avec Nantes. L’avant-port devint un port à part entière.
Je ne peux résister à introduire une boutade de M. de Serbois tirée de son livre « Souvenirs de voyages en Bretagne et en Grèce » paru en 1864 :
Quand on leur dit (aux Nazairiens) : « Vous allez être un autre Nantes ? », ils secouent la tête d’un air modeste, et répondent : « Oh pas encore ! » mais en sous-entendant : « Bientôt ».
*) Compagnie d’Orléans avec la ligne Paris, Tours, Nantes en 1851 (427 kilomètres de Paris) et Saint- Nazaire en 1857 (491 kilomètres de Paris, 64 kilomètres de Nantes).
Développement de Saint-Nazaire

Pour nous permettre de visualiser les différentes phases de son développement (implantations des chantiers, transitions administratives et infrastructures portuaires), il m’a semblé judicieux de réaliser un synoptique (N-3) pour la période la plus significative.
L’intégration dans celui-ci des résultats du commerce du port aurait été intéressant LO ok mais à l’heure où j’écris je n’ai que des résultats partiels du tonnage de Saint-Nazaire pour cette période.
Voyons quelques dates importantes :
- 1856 – Inauguration du premier bassin, dit « bassin de Saint-Nazaire » ;
- 1857 – La Compagnie du chemin de fer de Paris à Orléans relie Saint-Nazaire à Nantes ;
- 1862 – Établissement du chantier naval Scott * ;
- 1862 – Installation des lignes postales transatlantiques vers l’Amérique centrale par la Cie Générale Transatlantique. Le 14 avril 1862, le paquebot Louisiane ** part de Saint-Nazaire pour Veracruz, inaugurant la ligne vers le Mexique ;
- 24 avril 1864 – Lancement de l’Impératrice Eugénie *** , le premier des cinq paquebots construits pour le compte de la Cie Générale Transatlantique par le chantier Scott ;
- 1865 – Le village de Méan**** situé à proximité du chantier de Penhouët est détaché de la commune de Montoir pour intégrer celle de Saint-Nazaire ;
- 1866 – Les chantiers Scott font faillite ;
- 1868 – Saint-Nazaire devient sous-préfecture à la place de Savenay ;
- 1869 – La Compagnie Générale Transatlantique cède l’ancien chantier Scott, dont elle est devenue propriétaire, à la Société des chantiers et ateliers de l’Océan ;
- 1870 – Fermeture des chantiers de l’Océan ;
- 1879 – Fondation de la Chambre de commerce de Saint-Nazaire ;
- 08 mai1881 – Inauguration du second bassin, dit « bassin de Penhouët » *****.
*) Aussi appelé communément « Chantier de Penhouët » (Penhouët, selon la graphie de l’époque.)
**) « Louisiane » ; ligne du Mexique ; trois-mâts à vapeur à hélice ; 1115 tonneaux, construit en 1862 à Glasgow ; 89 m de long ; 12 m de large ; vitesse 12 à 13 nœuds.
***) « Impératrice Eugénie » ; ligne de New York ; paquebot à vapeur à roues ; 106 m de long ; 13,40 de large ; déplacement 5650 tx ; vitesse 13 à 14 nœuds.
****) Méan (Méans, selon la graphie de l’époque) est un petit port à l’embouchure du Brivet. Vers 1856, son trafic était plus important que celui de Saint-Nazaire.
Sa population, principalement maritime, se composait en grande partie de navigateurs et de charpentiers de marine. C’était une véritable pépinière de capitaines au long cours et de maîtres de cabotage. Trois chantiers de construction navale œuvraient sur ses rives : les chantiers Vince, Ollivaud, et Mahé. Une industrie connexe s’était développée : les forges Dandeau, un poulieur et un cordier. Un poste de douane y était implanté.
Il a été détaché de la commune de Montoir dans le cadre d’une possible continuité du développement du port de Saint-Nazaire jusqu’au Brivet.

*****) Le creusement du bassin se fit en plusieurs phases.
1ère : « Creusement d’une partie du bassin et établissement de la partie correspondante des chantiers de constructions. » Adjudication le vendredi 4 ou 11 avril 1862 ;
2e : « Construction de l’écluse à sas et de la digue de ceinture du bassin à flot. » Adjudication le 11 mai 1864 ;
3e : « Creusement du bassin de Penhouët. » Adjudication des travaux le 18 août 1869 ;
4e : « Travaux d’établissement de portes métalliques à l’écluse à sas de Penhouët. » Adjudication le 18-08-1869.
On remarque qu’en 1875, notre année de référence, il n’y avait plus de grand chantier de construction navale à Saint-Nazaire.
Évolution de la population de Saint-Nazaire

En matière d’évolution de la population, les établissement des deux bassins, le premier en 1856 et le second en 1881, ont été déterminants. On observe des accroissements en 1861 et 1866 respectivement de 89% et 75% ; en 1886 et 1891 respectivement de 28% et 21%.
Il faut noter que le rattachement du quartier de Méan, initialement faisant partie de Montoir, amena environ 2500 habitants au recensement de 1866.
La fermeture du chantier Scott en 1866 fut la cause de la baisse de la population observée en 1872, près de 2000 familles ouvrières quittèrent Saint-Nazaire. L’influence de l’ouverture et la fermeture du chantier de l’Océan ne peuvent être quantifiées. La désorganisation due à la guerre de 1870 a probablement, elle aussi, contribué à cette baisse.