1862 – Le Chantier de la Compagnie générale transatlantique – Chronologie du chantier

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1862 – Le chantier de la Compagnie générale transatlantique

Le Chantier de la Compagnie générale transatlantique dit chantier de Penhouet ou chantier Scott

Chronologie de l’établissement du chantier

U-1 – 1862 – Chantier Scott. – Dessin Michel-Claude Mahé

Nous avons vu dans le dernier article que les tracasseries engendrées par les chantiers français lors des appels d’offre pour construire sa flotte de paquebots ont décidé la Compagnie générale transatlantique à implanter un chantier en France mais sous la direction de constructeurs anglais, MM. Scott et Cie, avec des ouvriers français. Un site fut retenu : une partie du rocher de Penhouet sur la commune de Montoir. Le temps presse, un formidable challenge reste à accomplir pour respecter les délais.

U-2 – Synoptique de l’activité du chantier Scott – Dessin Michel-Claude Mahé

Commentaires sur l’établissement du diagramme U-2 :
Les travaux d’établissement du chantier démarrèrent le 19 avril 1862. Il semble que M. Scott et ses contremaîtres étaient sur place début mai.
En 7 mois, du 19 avril au 15 décembre, il a fallu : remblayer, installer cinq cales de construction (quatre dans un premier temps plus une un peu plus tard), bâtir le grand atelier, mettre en place la production de vapeur et ses circuits, installer les machines pour l’usinage et le formage des pièces (raboteuses, cintreuses, plaques à cintrer, etc.) et commencer à produire.
Pour les navires, les informations fiables sont les dates de lancement et de mises en service, lesquelles paraissent toujours dans la presse locale, nationale et internationale. On sait que pour construire sur cale l’Impératrice Eugénie, il a fallu 16 mois (corroborés par une date : le 15 décembre). On peut donc en déduire approximativement, pour les cinq premiers navires sisterships de la compagnie, la date de mise sur cale en sachant que la tendance veut que les délais se réduisent dans les cas de constructions identiques.
Le lancement de la France fut retardé. Le peu de hauteur des eaux de la Loire a décalé l’arrivée de sa machine et rendu inutile son entrée dans le port.
Le cas du Saint-Laurent est particulier, car les ingénieurs opérèrent un changement de mode de propulsion directement sur cale (il est passé de roues à aubes à une hélice) ce qui explique certainement le décalage.
Pour les autres navires, c’est plus compliqué, nous ne possédons pas le temps de construction moyen.
Les nombres d’employés indiqués sont issus des différents comptes-rendus du Conseil général de la Loire-Inférieure et de la Chambre de Commerce. Ils nous donnent une idée toute relative de l’activité du chantier.

Pour garder en mémoire le déroulement temporel et contextuel, il m’a semblé intéressant de mettre en parallèle la naissance de la Compagnie * et du creusement du bassin de Penhouet.
1) Adjudication du vendredi 11 avril 1862 : « Creusement d’une partie du bassin et établissement de la partie correspondante des chantiers de constructions. » ;
2) Adjudication du 11 mai 1864 : « Construction de l’écluse à sas et de la digue de ceinture du bassin à flot. » ;
3) Adjudications du 18 août 1869 : « Creusement du bassin de Penhouët. » et « Travaux d’établissement de portes métalliques à l’écluse à sas de Penhouët. ».

*) Voir Article « 1861 – De la Compagnie générale maritime à la Compagnie générale transatlantique ».

1862

Établissement du chantier
Nous l’avons vu dans le dernier article, en ce début d’année 1862, le Chantier de la Compagnie transatlantique, conduit par MM. Scott et Cie, va s’établir sur un terrain domanial, correspondant à une partie du rocher de Penhoët. Il sera limitrophe du nouveau bassin, celui de Penhouet, qui fera suite au bassin de Saint-Nazaire déjà existant. Au début, le creusement de l’un servira au remblaiement de l’autre.
Ce terrain, situé à environ deux kilomètres de Saint-Nazaire, fut approprié et remblayé sous la direction de l’administration des ponts-et-chaussées et de son ingénieur en chef chargé du dossier M. Chatoney.
L’adjudication * pour le creusement d’une partie du bassin de Penhouet et l’établissement des chantiers de construction a eu lieu 11 avril 1862 à 13 h 00 à l’hôtel de la Préfecture, à Nantes.
Quatre soumissionnaires se sont présentés ; c’est M. Henau Florestan qui a été déclaré adjudicataire.

*) Adjudication notée 1 sur le diagramme U-2 et établie comme suit :
1) Travaux à l’entreprise consistant en terrassements et perrés : 232 238 fr. 69
2) Somme à valoir pour épuisements, avaries de mer et travaux non prévus : 37 764 fr. 31
Total général des dépenses : 270 000 fr. 00
Cautionnement : 7 800 fr. 00
Quatre soumissionnaires se sont présentés, les propositions furent les suivantes :
MM. Champenois : 6% de rabais ; Henau Florestan : 11 % ; Nercam : 2% ; Bréhéret : 7 %

Dans la presse, autour du 19 avril, on faisait état du démarrage des travaux : « Sur les limites du nouveau bassin, dit de Penhouët, de vastes chantiers de construction, destinés aux transatlantiques et au commerce, se dessinent et se nivellent. ».
Le 25 avril : « On achève en hâte de disposer les cales de construction sur lesquelles seront assis les immenses steamers transatlantiques. » « On termine également à Saint-Nazaire les hangars nécessaires à la Compagnie générale transatlantique pour abriter les marchandises à embarquer ou à débarquer » On annonce l’arrivée imminente de M. Scott et de ses contremaîtres sur le site pour débuter la construction des navires.

U-3 – Le chantier Scott avant mars 1863 * – Crédit photo : Musée de Bretagne

*) Le musée de Bretagne précise que la photo a été prise en mars 1863. Après quelques investigations et à la lecture du diagramme U-2 il me semble que c’est plus tard, probablement en mars 1864. L’Impératrice -Eugénie (ex Nouveau-Monde), France et Nouveau-Monde sont alors sur cale dans un état avancé.

U-4 – Photographie de la baie de Saint-Nazaire (avant 1877) * – En arrière-plan le chantier Scott – Crédit photo : Musée d’Archéologie nationale – Domaine national de Saint-Germain-en-Laye.
*) Aimablement signalée par M. Xavier Kerdaniel.

Le chantier
Nous disposons de quelques éléments d’une description du chantier parus en octobre 1862 dans la presse : « L’étendue de ce chantier est de 4 hectares, sur lesquels sont disposés les hangars et les ateliers, ainsi que quatre cales de 120 mètres chacune se prolongeant dans la Loire. Le grand hangar en maçonnerie qui abrite les machines à percer, les plaques à cintrer, les appareils moteurs, etc., a 125 mètres de long, il est ouvert de bout en bout, du côté de la rivière, et la toiture en est supportée par cinquante colonnes en fonte de forte dimension et d’un bel effet. »
L’outillage complet a été importé d’Angleterre.
Il est dirigé par M. Scott, avec le concours de deux ingénieurs français, M. Forquenot *, en charge de la direction technique, et MM. Audenet ** et Noël, en charge de la surveillance de l’exécution des travaux ainsi que 15 spécialistes et contremaitres écossais. Cependant tous les ouvriers sont français.
En avril 1864, M. William Shand apparaît dans la presse comme directeur des chantiers , en mai 1865, c’est M. Audenet.
*) M. Forquenot, ingénieur détaché de la marine, directeur à Paris du service des constructions de la compagnie, auteur du plan, auteur de la belle frégate en fer la Couronne
**) MM. Audenet et Noël, ingénieurs détachés de la marine.
En septembre 1862, le chantier fonctionnait avec 600 ouvriers.
Mi-octobre 1862, une cité ouvrière pour loger les ouvriers employés dans l’établissement et venant de Nantes, Indret, etc. était en cours de création.

1863

Le boom immobilier
L’arrivée de nouveaux habitants provoqua un boom immobilier sur la partie de Penhoët à proximité du chantier et du futur bassin. De nombreux terrains furent mis en vente. Ils se couvrirent de constructions « disposées, sans ordre ni alignement possible, au gré des avantages ou des caprices de chaque constructeur ».

Indépendamment de la cité ouvrière de la compagnie, des investisseurs ont rapidement compris l’intérêt que cet afflux d’ouvriers pouvait représenter, ils construisirent la « cité ouvrière de Penhouet » *.
Située non loin du chantier de Penhouet et du bassin du même nom en construction, c’était un bâtiment de trois étages avec de vastes greniers, des caves, une cuisine et une buanderie.
Au début d’août 1863, 130 ouvriers y logeaient. Il pouvait en contenir 210.
Elle a fait partie des lieux à visiter à Saint-Nazaire, avec le chantier, lors d’une excursion maritime organisée par la compagnie des Pyroscaphes au départ de Nantes.

*) Un article lui sera consacré dans les prochains mois.

Le 1er juin 1963, devant cet afflux considérable d’habitants sur Montoir/Penhouet, un deuxième facteur prit ses fonctions.

En décembre 1863, pour régulariser le chaos immobilier, le Conseil général, adoptant la demande de Saint-Nazaire, émit le vœu « qu’un plan des rues et voies de communication à réserver ou à ouvrir entre Méans et Penhouet, soit dressé et rendu obligatoire dans le plus bref délai ».

Le chantier
En homme d’affaires avisé, M. Scott armait des navires pour son chantier et proposait ses services aux autres exportateurs. On sait, qu’en juillet 1863, il armait le Brackenholme, capitaine Smorfitt, au départ de Saint-Nazaire pour Greenock.

En septembre 1863, il recevait des bois venus de Québec par le Patrician (anglais), capitaine Wathen ; courtier : C. Boudet, à Saint-Nazaire.
Détails de chargements : 29 pièces chêne, 56 pièces orme, 858 pièces, 916 madriers, 2074 bouts de madriers sapin.

Décembre 1863, trois paquebots (Impératrice-Eugénie * ; France ; Nouveau-Monde) étaient sur cale. Le Panama était ou le serait sous peu. Une cinquième cale de construction a été installée. Environ 1200 ouvriers travaillaient sur le chantier.

*) Le paquebot fut renommé quelques jours avant son lancement. Il s’appelait initialement Nouveau-Monde et devint Impératrice-Eugénie. Les cartons d’invitation de la cérémonie portaient toujours la mention Nouveau-Monde.

Mises à jour :
05-02-2024 – Photographie de la baie de Saint-Nazaire

A propos Michel-Claude Mahé

Je suis un retraité éternel apprenant. Passionné d'histoire, de dessin, de philosophie, de mathématiques, d'informatique...
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