Compagnie générale transatlantique – Les ports de la ligne du Mexique autour de 1862 – La Vera-Cruz – La route de Vera-Cruz à Mexico par Jalapa

Articles connexes
L’estuaire de la Loire autour de 1875
Les types de navires à voiles
Les navires inscrits au port de Nantes en 1875
Les armements nantais au 1er janvier 1875
Les chantiers navals en Basse-Loire au 1er janvier 1875
Saint-Nazaire, naissance d’un port
La naissance des services transatlantiques en France de 1840 à 1855
La naissance des services transatlantiques en France – 1856 à 1860
La naissance des services transatlantiques en France – 1857 à 1861
1861 – De la Compagnie générale maritime à la Compagnie générale transatlantique
1862 – Compagnie Générale transatlantique – La Ligne du Mexique
1864 – La Compagnie générale transatlantique – La Ligne le Havre – New York
La Compagnie générale transatlantique en 1875
1862 – Le chantier de la Compagnie générale transatlantique
1862 – Le Chantier de la Compagnie générale transatlantique – Chronologie du chantier
Le lancement d’un navire autour de 1864 – La cale de lancement
Le lancement d’un navire autour de 1864 – Berceau de lancement sur coulisse unique
Le lancement de l’Impératrice-Eugénie, le 23 avril 1864
Petite histoire de la propulsion motorisée des bateaux – La liburne zoolique
Ligne Saint-Nazaire à Vera-Cruz en 1865 – L’impératrice Eugénie
Premier voyage de l’Impératrice Eugénie – 16 février au 15 avril 1865 – L’équipage
Notice biographique du capitaine Laurent Pierre, Michel, Albert.
Premier voyage de l’Impératrice Eugénie du 16 février au 15 avril 1865
Second voyage de l’Impératrice Eugénie du 16 mai au 10 juillet 1865 – Voyages et passagers
Principaux termes liés à la cargaison des navires au milieu du 19e siècle
Paquebot Impératrice-Eugénie, ligne du Mexique du 16 mai au 10 juillet 1865 – Route Vera-Cruz – Saint-Nazaire – Les marchandises débarquées le 10 juillet 1865 à Saint-Nazaire
Paquebot Impératrice-Eugénie, ligne du Mexique du 16 mai au 10 juillet 1865 – Route Vera-Cruz – Saint-Nazaire – Les marchandises débarquées le 10 juillet 1865 à Saint-Nazaire
Compagnie générale transatlantique – Les ports de la ligne du Mexique autour de 1862 – La Vera-Cruz – Situation géographique
Compagnie générale transatlantique – Les ports de la ligne du Mexique autour de 1862 – La Vera-Cruz – La ville
Compagnie générale transatlantique – Les ports de la ligne du Mexique autour de 1862 – La Vera-Cruz – Les conditions environnementales
Compagnie générale transatlantique – Les ports de la ligne du Mexique autour de 1862 – La Vera-Cruz – La vie quotidienne
Compagnie générale transatlantique – Les ports de la ligne du Mexique autour de 1862 – La Vera-Cruz – Les routes de La Vera-Cruz à Mexico – Généralités

Nous avons vu dans le dernier article les généralités sur les routes allant de la Vera-Cruz à Mexico. Il n’y en avait que deux, l’une passant par Orizaba, l’autre par Jalapa. C’est cette dernière que je vous propose de parcourir en découvrant ce que notre voyageur pouvait découvrir, admirer.
« T’es zinzin » m’a dit mon ami Clovis du Tillou, mon plus fidèle lecteur devant un Schweppes cognac bien frais, « À quoi ça sert de décrire ces routes puisque tu travailles sur la Transat ? Tu vas soûler tes lecteurs. »
Et moi de lui répondre : « Tu n’as pas tort, mais cette démarche était nécessaire pour mieux appréhender les difficultés qu’un voyageur embarqué à Saint-Nazaire pouvait rencontrer : traverser l’Atlantique (promiscuité, tempête etc.), séjourner à La Vera-Cruz (le climat tropical, la maladie, etc.), puis aller à Mexico (inconfort du voyage, les attaques de bandits, etc.) ».
J’ai découvert à travers cette étude qu’il fallait avoir un tempérament d’aventurier pour entreprendre un tel périple, sachant que des femmes et des enfants faisaient le voyage pour retrouver leur père, leur mari en poste pour l’État, pour des maisons de commerce ou simplement pour chercher fortune.
Nous allons en rester là pour Vera-Cruz malgré qu’il y a tellement de choses intéressantes à dire, notamment l’intervention française au Mexique que j’ai quelque peu étudiée mais volontairement occultée dans mes articles pour ne pas m’éloigner un peu plus de mon sujet : l’étude sommaire des ports d’escales de la Compagnie générale transatlantique.

La route de Vera-Cruz à Mexico par Jalapa (aussi Xalapa)

AM-1 – Les étapes de la route La Vera-Cruz à Mexico par Jalapa. Dessin Michel-Claude Mahé
AM-2 – Altitude des étapes de la route La Vera-Cruz à Mexico par Jalapa. Dessin Michel-Claude Mahé
AM-3 – Route de Vera-Cruz à Perote. Dessin Michel-Claude Mahé

La Vera-Cruz à Jalapa

Nous l’avons vu, Vera-Cruz était le seul port du Mexique de la côte Est qui était relié avec l’intérieur du pays par une route carrossable. De 1800 à 1810, au temps des Espagnols, le Consulado de Vera-Cruz, une institution municipale, avait construit une route de Vera-Cruz au sommet des montagnes. C’était une très belle voie réalisée tantôt en pavés réguliers du basalte des montagnes de trente pieds de large, tantôt par une chaussée maçonnée.
Pendant la guerre de l’indépendance, elle fut rompue en plusieurs points, particulièrement aux endroits les plus difficiles, pour barrer le passage aux convois, aux troupes espagnoles qui venaient au secours de celles de la métropole. Depuis lors, le pays n’était jamais sorti de l’anarchie et des révolutions et d’aucuns ne s’inquiétèrent de la remettre en état.
En 1862, de ce qui semblait en rester, les voyageurs faisaient état de la chaussée pavée de Saint-Miguel, qui débutant non loin de Jalapa, s’élevait sur les montagnes et serpentait à travers les forêts jusqu’à 2000 m. Ils notaient qu’elle n’était pas entretenue et avait besoin de réparations.

AM-4 – Le Puente-Nacional (Le Pont Nation). BNF-Gallica

De la Vera-Cruz à Jalapa, la végétation est pauvre, la terre est aride. On traverse le Puente-Nacional, un pont franchissant un profond ravin au fond duquel coule le Rio de la Antigua.
Parvenu à la hauteur d’environ 1200 mètres, le voyageur était rassuré : il avait dépassé la limite du royaume de la fièvre jaune.

Pour éviter de dénaturer l’impression qu’elle leur a faite, laissons les voyageurs nous décrire leur arrivée à Jalapa : « Dans les environs de Jalapa, la nature commence à se couvrir d’une riche végétation. La chaleur y est moins grande que sur la côte, la rosée plus abondante, l’atmosphère plus humide.
Les forêts s’élèvent riantes et embaumées, les lianes grimpent, s’entortillent aux branches et semblent jeter des guirlandes de verdure d’un arbre à l’autre ; l’orchis parasite décore le vert du feuillage de l’éclat de ses couleurs, et l’abondance des fleurs attire des milliers de colibris qui voltigent de l’une à l’autre. Les chemins sont bordés de haies de daturas, d’hibiscus et de rosiers ; la fleur de l’oranger remplit l’air de son parfum. On y voit aussi les plantes des pays tempérés croître à côté de celles des tropiques ; le pêcher mêle ses branches à celles du goyavier, et le pommier arrondit ses fruits non loin de l’avocat. La terre y est prodigue de ses dons. »
Un autre témoignage : « Les haies sont couvertes d’un liseron aux fleurs d’un bleu éclatant, qui serpente au milieu des ronces épineuses : c’est le fameux convolvulus jalapa, dont la racine fut communiquée par les Indiens aux Européens comme un des purgatifs les plus énergiques, et qui est généralement connu sous le nom de jalap. Cette plante est d’une abondance extraordinaire, et forme un des plus beaux ornements de la vallée à laquelle elle a donné son nom. * »

*) Je suggère au lecteur de se reporter à l’article : « Principaux termes liés à la cargaison des navires au milieu du 19e siècle – § Le jalap ».

AM-5 – Hutte indienne dans la Tierra Caliente – Source Library of Congress.
AM-6 – Famille d’Indiens des environs de Jalapa (Croquis de M. Raymond, capitaine au 62e)
Source Gallica-BNF.

De loin en loin, on pouvait voir les huttes des Indiens avec leurs murs à claire-voie et sur la route des hommes à pied ou à cheval. Les cavaliers sont vêtus de leur sarape et d’un pantalon avec par-dessus celui-ci un second pantalon plus large et ouvert sur les côtés.

AM-7 – Jalapa, siège du gouvernement de l’État de la Vera-Cruz. – Source Gallica-BNF.

Notre voyageur atteignait Jalapa, maintenant Xalapa, (92km ; 22 lieues mexicaines de Vera-Cruz). Elle est à 1 300 mètres au-dessus de la mer et bâtie sur une des terrasses par lesquelles le plateau central s’abaisse sur le golfe du Mexique, dans la zone des terres tempérées (tierra templada).
La ville était jolie dans son ensemble et pittoresque par la disposition et la distribution étagée de ses bâtiments. En 1862, sa population ne dépassait guère dix à douze mille habitants. Ses édifices principaux étaient : le couvent de Saint-François, l’église San-José, la caserne Saint-Ignace et la chapelle du Calvaire.
Les riches habitants de la Vera-Cruz y allaient chercher la fraîcheur et son environnement agréable. Les voyageurs parlaient d’elle comme « un paradis terrestre au printemps perpétuel où le sol donnait en abondance une variété de productions sans pareille ».
Son commerce s’exerçait sur les productions des environs : maïs, légumes, fruits, canne à sucre, miel. Elle possédait des fabriques de faïence, des corroieries et des tanneries.

*) Corroierie : bâtiment où l’on effectue les opérations de finissage du cuir brut (corroyage) effectuées après le tannage.

De Jalapa à Perote

AM-8 – Route de Vera-Cruz à Perote. Dessin Michel-Claude Mahé

À mesure qu’il montait vers Pérote, il voyait se succéder les différents panoramas de la végétation tropicale, ceux des zones tempérées et même boréales, avec leur ciel, leurs plantes, leurs habitants et les cultures auxquelles ils se livraient. En un jour, il pouvait passer du niveau de la mer, où régnaient en été des chaleurs suffocantes, aux neiges éternelles. Il voyait ainsi défiler : les caféiers, les plantations sucrières, les bananeraies, les agaves, les arbres de nos contrées, ceux du nord puis les lichens des régions polaires.
À La Vigas (121 km ; 39 lieues mexicaines de Vera-Cruz), il se trouvait sur le plateau à 2 400 m au-dessus de la mer.

AM-9 – Le fort et le Cofre de Perote – Source Gallica-BNF.

La petite ville de Perote, située à 2 380 mètres au-dessus du niveau de la mer, au début d’une une longue plaine aride et inculte, offrait un climat froid qui contrastait avec celui de la côte. Elle était dominée par une montagne avec un large sommet que les indigènes ont appelé Nauhcampatepctl (montagne carrée) et les Espagnols, le Cofre.

AM-10 – Route de Perote à La Puebla. Dessin Michel-Claude Mahé

De Perote à La Puebla de los Angeles

Entre Perote et la Venta del Pinal (2 500 mètres d’altitude), la route traverse quelques plaines marécageuses alimentées à la saison des pluies par des eaux descendant des hauteurs environnantes.
À Amozoc, les deux routes de la Vera-Cruz, celle passant par Jalapa et l’autre par Orizaba se réunissent. C’était un gros bourg où transitaient les productions des haciendas ou fermes des environs.
Lorsque notre voyageur s’approchait de La Puebla de los Angeles, la route devenait plus fréquentée, plus animée et la circulation des arrieros (muletiers), des mules, des chariots de transport devenait plus difficile.

AM-11 – Vue de Puebla de los Angeles et des monts, de gauche à droite, Papacatepetl et Iztacihuatl (la femme blanche) – Source Gallica-BNF.

La Puebla de los Angeles, fondée en 1531 était la principale étape de la route de la Vera-Cruz à Mexico. Elle doit son nom « Cité des Anges », pour les uns, a une croyance des habitants qu’elle fut bâtie par des anges, pour d’autres à la beauté de son climat.
Avec ses 70 000 habitants, elle était considérée comme la seconde ville en importance de la république mexicaine. Ses rues, bien pavées et très propres, étaient tirées au cordeau et bordées de larges trottoirs. Elle était alimentée par quarante-quatre fontaines publiques.
Ses principaux édifices étaient : la cathédrale, le palais épiscopal, celui du gouvernement civil, l’hôpital, le musée, 5 églises paroissiales, 71 temples ou chapelles, 20 couvents ou communautés religieuses, 3 casernes d’infanterie et 2 de cavalerie.
C’était une place commerciale importante et elle possédait des établissements industriels tels que des filatures, des savonneries, des verreries et des fabriques de faïence.

De La Puebla à Mexico

AM-12 – Route de la Puebla à Mexico – Dessin Michel-Claude Mahé

À la sortie de Puebla, notre voyageur traversait les plaines fertiles de San-Martin de Tesmelucan. Elles s’étendent de Tlascala au nord, jusqu’à Cholula au sud. Le terrain devient ensuite plus accidenté dans la direction de Mexico.
Il apercevait la cime enneigée de l’Iztaccihualt (la Femme Blanche), ancien volcan de 4,780 mètres au-dessus de la mer (voir fig. AM-11). Il doit son nom à la forme de son sommet formée de quatre pics représentant la tête, la poitrine, les genoux et les pieds d’une femme couchée. À ses côtés, le volcan Popocatepetl, 5 410 mètres, du cratère duquel s’échappent des fumerolles.

AM-13 – Rio Frio – Dessin de E. de Bérard d’après Dauzas – Source Gallica-BNF.

La route monte jusqu’au petit village de Rio-Frio dépendant d’une ferme située au milieu d’une forêt. Dans son voisinage, elle atteint là son point culminant, 3 302 m. Puis on amorce la descente vers la vallée de Mexico située à environ 2 300 m. La route serpente alors à travers des forêts de pins résineux dégageant une odeur agréable.

La vallée de Mexico – Mexico

AM-14 – Vue de Mexico prise depuis la tour de Sn. Agustin entre 1840 et 1845 * – Pedro Gualdi – Source Bibliothèque du Congrès.

*) Cette vue plongeante sur la ville de Mexico montre la cathédrale au centre gauche dominant le paysage et aussi une rue avec des piétons en bas à droite.

Notre voyageur, en descendant le versant sud-est des montagnes, commençait à découvrir la vallée de Mexico située à 2 277 mètres au-dessus du niveau de la mer et entourée de toutes parts de montagnes.
Ce plateau central est occupé sur une grande partie par six grands lacs. On distingue, du sud vers le nord : le lac Chalco séparé de celui de Jochimilco par une chaussée ; le grand lac Tezcuco, près duquel est assise la capitale ; le lac San-Cristoval, au nord-est de celle-ci ; et les lacs Jaltocan et de Zumpango. L’eau de ces lacs est douce, sauf celle du lac Tezcuco, qui est salée. Depuis la conquête, ces nappes d’eau se sont considérablement rétrécies.

La dernière étape de notre voyageur fut Ayotla, un joli petit village sur les bords du lac Chalco encadré d’une nature verdoyante ; puis il atteignit la seule chaussée de l’est qui subsistait sur les quatre construites sur le lac et menant à la capitale des Aztèques.

De l’avis de voyageurs, Mexico était la plus belle ville du Mexique. Sa population dépassait 200 000 habitants. Ses rues, orientées vers les quatre points cardinaux, étaient parfaitement alignées, bien pavées, munies de trottoirs et bordées de belles maisons peintes de couleurs assez crues qui avaient généralement deux étages. De beaux ouvrages en serrurerie ornaient les balcons et les fenêtres de rez-de-chaussée.
Elle avait en son sein, une soixantaine d’églises, une quarantaine de couvents, des établissements civils ou militaires parmi ceux-ci s’élevaient sur un vaste quadrilatère, la plaza Mayor : la cathédrale et le palais national, siège du gouvernement, avec tous les ministères, le sénat, la chambre des députés, la cour suprême de justice, la commanderie générale, la trésorerie, l’hôtel des monnaies, l’hôtel de la poste, le jardin botanique et trois casernes. Sur les deux autres côtés des bâtiments à galeries couvertes et l’hôtel de ville.

Avatar de Inconnu

About Michel-Claude Mahé

Je suis un retraité éternel apprenant. Passionné d'histoire, de dessin, de philosophie, de mathématiques, d'informatique...
Cet article, publié dans La Compagnie générale transatlantique, La ligne du Mexique, est tagué , , , , . Ajoutez ce permalien à vos favoris.

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.