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Petite histoire de la propulsion motorisée des bateaux
Service commercial de navires à vapeur
Les sociétés Andriel & Perrin et Cie, Andriel & Pajol et Cie et Pajol et Cie
Comme nous l’avons vu dans les articles précédents, Pierre Andriel et ses différents associés souhaitaient introduire en France un nouveau système de navigation accéléré en employant les bateaux à vapeur. Ces derniers étaient largement développés aux États-Unis, en Angleterre et en Écosse.
Plusieurs sociétés se succédèrent au gré des difficultés rencontrées : Andriel & Perrin, Andriel & Pajol et Pajol et Cie. Ceci sur une courte période : quatre années, un feu de paille, mais, à mon sens, elle fut déterminante pour le développement des bateaux à vapeur sur notre territoire.

Dessin Michel-C Mahé
La société, Andriel Perrin et Cie
La première société, Andriel * Perrin ** et Cie, était composée de MM. Pierre Andriel *, Nicolas Perrin, de Verdun, et Samuel Phalys, un Anglais ***. Le siège était alors à Paris, au n° 8 rue Thiroux.
*) Article « Les sociétés Andriel Perrin et compagnie et Andriel Pajol et compagnie – Les protagonistes – Pierre Andriel ».
**) Perin sur certains documents.
***) En janvier, 1816, la société est répertoriée dans l’Almanach de 25,000 adresses comme suit : « Andriel, Perrin et comp., inventeurs des procédés de construction de bâtiments de navigation combinés avec des machines à vapeur, rue Thiroux. 8. »
Le 27 janvier 1815, un brevet d’importation de quinze ans leur fut délivré « pour des procédés de construction de bâtiments de navigation combinés avec des machines à vapeur et organisés pour marcher, quels que soient les courants ». Les documents qu’ils ont fourni alors à l’administration concernaient une barque à rames.

Principe de fonctionnement – Coupe transversale du bateau.
Source : Archives historiques de l’INPI – Dessin Michel-C Mahé
Le brevet fut modifié, le 2 juin 1815, pour adapter des bateaux remorqueurs articulés à leur système de navigation accélérée.

Par curiosité, j’ai coté le schéma initial à partir de l’échelle indiquée sur le document fourni à l’administration. Je me suis rendu compte que leur bateau remorqueur articulé était de très modestes dimensions.
Le bateau remorqueur articulé
Ce projet consistait à former un train de bateaux, avec un remorqueur et plusieurs petites barques, assemblées entre eux par une rotule formée par deux demi-cylindres, convexe à l’avant et concave à l’arrière, permettant une articulation de l’ensemble du train.
Dans une ligne droite, il se comportait comme un bateau normal, cependant la mobilité des éléments du train était censée lui permettre de suivre les courbes d’un canal.
Les avantages qu’Andriel et Pajol mettaient en avant étaient de rendre les chargements, les déchargements et les réparations plus faciles, car toutes ces opérations pouvaient se faire séparément et simultanément pour chacune des barques et en des lieux différents.
Son exploitation sera retardée d’une part par la recherche des capitaux et crédits qu’elle exigeait, et d’autre part les événements politiques avec la fin des Cent-Jours, la chute définitive de Napoléon Ier et du Premier Empire, le retour des Bourbons au pouvoir. Le projet fut abandonné au profit de bateaux conventionnels.

La société Andriel Pajol et Compagnie
Pour exploiter les brevets obtenus en 1815, Pierre Andriel s’associait avec le lieutenant-général Pajol * le 28 décembre 1815, par devant Me Bellanger et son collègue, sous la raison sociale P. Andriel Pajol et Compagnie. Les deux hommes se connaissaient depuis longtemps. Le général Pajol apportait son activité, sa fortune et l’appui de son nom.
Ils obtinrent le soutien de Jacques Laffitte, régent de la Banque de France et chef de la maison Perregaux, Laffite et Cie. L’administration de la société fut établie au n°1 quai Voltaire, à Paris, chez le général Pajol.
*) Article « Les sociétés Andriel Perrin et compagnie et Andriel Pajol et compagnie – Les protagonistes – Le général Pajol ».
De la première société, M. Samuel Phalys a cédé ses droits à MM. Pierre Andriel et Nicolas Perrin, et ce dernier a cédé les siens au comte Pierre-Claude Pajol, général en retraite.
C’était une société à commandite * par actions au porteur. Le fonds de l’entreprise était de 2 400 000 fr, réparti en 2 400 actions de 1 000 fr. chacune. Jacques Laffitte était président du conseil d’administration.
*) Ce type de société était courant à l’époque. « La société en commandite est celle qu’un marchand contracte avec un particulier pour un commerce qui sera fait au nom seul du marchand , et auquel l’autre contractant contribue seulement d’une certaine somme d’argent qu’il apporte pour servir à composer le fonds social, sous la convention qu’il aura une certaine part au profit, s’il y en a, et qu’il portera, dans le cas contraire, la même part des pertes, dont il ne pourra, néanmoins être tenu que jusqu’à concurrence des fonds qu’il a apportés en la société. »
Les actions étaient frappées de deux timbres : l’un représentait un bateau-coureur, entouré des mots « Honneur à Fulton » ; l’autre, Neptune et Éole enchaîné par Vulcain, entourés des mots « Prospérité du commerce ».
Un manifeste de présentation détaillé fut édité le 18 janvier 1816 pour les futurs actionnaires. Ils exposaient leur projet initial en se positionnant sur deux types d’exploitation :
-) Principalement, la construction et la vente des « bateaux conducteurs », destinés à remorquer les bateaux ordinaires des voituriers par eau, supprimant de ce fait les attelages de chevaux de trait sur les chemins de halage.
-) La construction de « bateaux coureurs » qui remonteront les fleuves ou les rivières les plus rapides, en faisant environ deux lieues par heure et en assurant une grande régularité.
Le 13 janvier 1816, le brevet fut cédé au général Pajol puis à Moulard et consorts le 13 mai 1816. Deux changements ont été apportés à celui-ci : un nouveau concept de machine à vapeur et un de chaudière.
L’épopée du Margery
Mi-janvier 1816, Pierre Andriel partait pour Londres pour choisir et acheter l’un des trois bateaux à vapeur qu’il savait s’y trouver. Deux ingénieurs français * l’accompagnaient pour étudier les derniers perfectionnements apportés par les Anglais dans la construction des machines à vapeur.
*) L’un s’appelait M. Ferry, ami de Monge, il était examinateur à l’école de Metz.
Pierre Andriel acquérait le Margery *, construit aux chantiers Archibald Mc Lachlan à Dumbarton (Écosse) et lancé en juin 1814. Ce bateau avait déjà fait ses preuves en mer puisqu’il avait déjà effectué le voyage de Glasgow à Londres. Un chroniqueur anglais écrivait à son sujet : « Il est arrivée en toute sécurité après un voyage très rapide ; une preuve convaincante que les bateaux à vapeur peuvent prendre la mer à n’importe quelle saison de l’année ».
*) Diminutif de Margaret.
Il tenta d’assurer sa vie et le Margery auprès des principales compagnies d’assurances, mais la défiance qu’inspiraient les bateaux à vapeur d’alors était-elle qu’aucune n’y consentit.
Le samedi 9 mars 1816, le bateau étant à Londres, Pierre Andriel, entreprit de traverser la Manche pour l’emmener au Havre * ; il y arrivait après une traversée épique le 18 mars. Puis, rebaptisera le Margery : L’Élise ** et le 19 mars, il lui fit reprendre sa route pour Paris où il y arrivait triomphalement le 29 mars.
*) Article « La société Pierre Andriel Pajol et Cie – L’Élise, la première liaison, faite sur le même bateau, d’une capitale à une autre ». Parution prévue en décembre.
**) En l’honneur de la fille du Maréchal Oudinot, femme du Comte Pajol.
En mars 1816, la presse faisait état de la construction à Rouen, dans les chantiers de la compagnie, d’un bateau à vapeur La Henriette *, de 140 pieds ** (46,6 m) de long et de deux pieds (0,66 m) de tirant d’eau en charge. D’une capacité de trois cents passagers, il était destiné à servir de coche sur la Seine.
*) On ne trouve plus de trace par la suite de ce navire sous ce nom. Peut-être est-ce l’Espérance.
**) Un pied égal à un tiers de mètre selon le décret du 12 février 1812 par Napoléon 1er.
Par une ordonnance du Roi, du 19 avril 1816, Andriel et Pajol obtinrent un brevet d’additions et de perfectionnement au brevet d’importation et de perfectionnement du 27 janvier 1815. Il consistait à adapter les bateaux remorqueurs articulés à leur système de navigation accélérée.
L’affaire fonctionna immédiatement. Ils s’étaient assuré la collaboration de M. Louis Martin, ingénieur-mécanicien, connu par la conception de la pompe foulante et aspirante qui a remplacé l’antique machine de Marly qui fournissait l’eau à la ville de Versailles.
En juin 1816, Andriel se sépara de Pajol, il tentait sa chance ailleurs.
La presse mentionnait, en juin 1816, que L’Élise continuait son service passager entre Rouen et Elbeuf et que la compagnie Andriel Pajol poursuivait la construction de bateaux remorqueurs dans ses chantiers de Compiègne et de Saint-Dizier. * On assurait alors qu’elle se proposait de placer un de ces bateaux sur la Meuse, au-dessus de Verdun.
En juillet 1816, on fait état que la compagnie Pajol et Andriel fait construire à Compiègne deux bateaux à vapeur pour la navigation de l’Oise et de la Seine.
*) De ces nouvelles constructions, on ne connaît qu’un seul bateau à vapeur : L’Espérance. (Voir Article « La société Pajol et Cie – L’Espérance, les premiers essais de remorquage sur la Seine. ». Parution prévue en janvier 2026)
La société Pajol et Compagnie
Au mois d’août (?) 1816, le général Pajol devint gérant de l’entreprise *, par acte passé devant M. Bellanger, notaire à Paris. Il y investira toutes ses ressources personnelles.
*) En 1817, Andriel & Pajol., sont toujours répertoriés dans l’Almanach des 25 000 adresses des principaux habitants de Paris comme : « Inventeurs des procèdes de construction de bâtiments de navigation combinés avec des machines à vapeur, quai Voltaire n°1 ».
Au début, les résultats de l’entreprise furent très satisfaisants, mais on les vit se dégrader pendant les années 1817 et 1818. Le général Pajol perdit alors une grande partie de sa fortune dans cette affaire. * Pour éviter de tout perdre, il se « retira » de l’association.
*) Les biens suivants furent vendus : l’hôtel de Besançon, près de la porte Noire, en face l’archevêché ; la terre d’Audeux et ses dépendances ; les fermes de Grange-Chérie et les morceaux de terre qu’il avait dans les environs de Nozeroy.
À la demande de Mme Pajol, affectée par le décès de leur fille Anne-Victorine en juillet 1817 et la vision permanente, quai Voltaire, de l’objet responsable de l’engloutissement d’une partie de leur fortune, la famille transporta son domicile rue Caumartin, en face du collège Bourbon.
Il écrivait à un ancien camarade de régiment de Saintonge, Guillot de la Poterie, en mai 1819, : « Fatigué de la guerre et de ses suites, depuis quatre ans j’ai pris ma retraite, et, comme vous, je serais très content, si je n’avais pas eu la sottise de vouloir entrer dans des spéculations, qui ne m’ont pas réussi. Ces maudits bateaux à vapeur, que j’ai introduits en France, m’ont complètement ruiné, et j’ai tout perdu, fors l’honneur. »
La société Pajol et compagnie cessa ses activités à la fin de l’année 1818 *. Une vente à l’amiable fut organisée le 1er novembre 1819 où furent vendus les bateaux à vapeur l’Élise et l’Espérance ainsi que deux pompes à feu (machines à vapeur), venues d’Angleterre, à haute pression.
*) Hypothèse : Il semble que la faillite ne fut pas prononcée, juste une cession d’activité. Les bateaux et tout le matériel annexe furent vendus à l’amiable. Dans le communiqué de la vente, il est précisé : « La Société des bateaux à vapeur, connue sous la raison de commerce de Pierre Pajol et Cie, étant venue à terme, ne se renouvellera plus par le seul fait de son expiration ».
Mises à jour : 21/11/2025 – Schémas du principe de fonctionnement et coupe tranversale du bateau à rames.