La répétition
La procession de la fête Dieu était soigneusement ordonnée : la batterie fanfare de l’Alerte de Méan ouvrait la procession, puis les porteurs de bannière, les enfants munis d’une corbeille remplie de pétales de roses, le dais avec ses porteurs sous lequel le prêtre présentait l’ostensoir contenant l’Hostie Sainte puis venait la foule de fidèles entonnant des cantiques.
L’abbé B. avait eu une idée. La procession étant arrêtée, les enfants exécuteront une
chorégraphie. Un coup de claquoir ils mettront un genou à terre, lanceront d’un geste gracieux quelques pétales. Un coup de claquoir ils se relèveront, pivoteront d’un quart de tour, mettront un genou à terre et ainsi de suite jusqu’au tour complet.
Ce soir là nous étions tous sur le parvis de l’église, nous avions terminé la répétition de la chorégraphie et l’abbé B. était très satisfait.
Pour manifester son contentement, il nous invita à entrer chez Rosa pour acheter des bonbons.
Il poussa la porte de la vieille devanture et le son familier de la clochette retentit. Il tenait la porte, nous entrâmes.
Jean-Pierre G. oubliant la présence du saint homme et agissant comme il le faisait d’habitude claironna un :
<Bonjour ma chérie !>
L’abbé lui envoya une claque magistrale. Déséquilibré Jean-Pierre chut sur le plancher.
Nous étions bouche bée même Rosa dans son fauteuil restait sans voix.
Jean-Pierre se releva, une joue un peu rouge.
<Ce n’est pas des manières…> tenta l’abbé, un peu confus, devant tous ces regards éberlués.
<Ce n’est pas des manières non plus, l’abbé ! > répliqua Rosa de sa voix aigrelette pleine de reproches.
L’incident n’eut aucune conséquence sinon que nous savions maintenant que notre bon abbé pouvait être violent et que Rosa, à qui Jean-Pierre faisait des misères, avait pris sa défense.